LES TROIS PRIORITES DE L'URGENCE MEDIATIQUE

Etrangement, même si beaucoup de décryptages sont désormais réalisés, de grands chantiers structurels ne sont ni clairement identifiés, ni ouverts. Voici résumées trois priorités :


- d'abord, L'OUVERTURE DE PLATEFORMES D'INFORMATION INTERMEDIAIRES. Par des initiatives privées ou publiques, développer des portails d'infos thématiques ou géographiques qui trient parmi la masse de ce qui est émis et proposent des sélections. Aujourd'hui, avec le grand écart local-global, le gouffre entre des médias traditionnels hyper sélectifs par nature et les millions d'infos émises est devenu insupportable. Ces médias traditionnels auraient d'ailleurs tout à gagner de telles plate-formes et devraient en organiser. Voilà un impératif démocratique essentiel, sous peine d'un décrochage, d'un morcellement médiatique. Sous peine aussi que le TEMPS DE L'IGNORANCE SOIT LE TEMPS DE LA MANIPULATION GENERALISEE. Jamais en effet l'oubli ne fut aussi rapide : les gommages de personnages sur les photos des soviétiques ne sont rien par rapport au pillage actuel d'idées et d'oeuvres ou la disparition totale de personnages.


- ensuite, il faut aborder une question de fond : la nécessité ou non d'un SERVICE PUBLIC. A part le Journal officiel, cela ne concerne pas les journaux mais les radios, les télévisions et les sites Internet. Quel rôle doit jouer ce service public qui puisse constituer une plus-value spécifique par rapport au privé ? Quel mode de financement quand, en France, la redevance apparaît comme un impôt fort inégalitaire ? Quel lien entre des médias locaux et nationaux ? A l'heure des groupes multimedias, comment organiser une offre publique cohérente ? Quelle doit être la part des créatrices/teurs et des savant(e)s comme modèles publics ?


- enfin, il est temps de comprendre que nous sommes entrés dans une GUERRE MONDIALE MEDIATIQUE. La publicité et la propagande sont partout, souvent déguisées en communication soft comme le placement de produits dans des films ou le financement de sondages et de scientifiques pour démontrer les idées que l'on veut faire avancer. Les exemples les plus énormes furent le mensonge d'Etat au sujet de l'Irak du gouvernement des Etats-Unis ou les meurtres perpétrés par des marques commerciales au nom de l'emploi alors que la nocivité des produits est avérée. Il importe alors d'obliger à sourcer. C'est l'affaire autant d'une autorité de régulation que d'associations. Qui finance quoi ? Qui travaille pour qui ? Les lobbies sont inévitables mais il faut qu'ils apparaissent clairement ?

En conclusion, il est stupéfiant que, dans notre univers de l'ubiquité médiatique, APPRENDRE A VOIR ne soit pas devenu une priorité aussi importante qu'apprendre à lire. Avoir des repères en histoire générale du visuel et des outils d'analyse d'images est indispensable à tout âge. Rassembler les ressources éparses sur le Net et les organiser avec une délégation interministérielle (pour éviter d'avoir les logiques de l'éducation d'un côté et de la culture de l'autre) devrait permettre de sortir de l'émiettement actuel qui coûte très cher et est inefficace parce que sans aucune coordination. Quel gouvernement aura enfin la lucidité de placer l'apprentissage des images (toutes les images, médias comme arts, car elle sont mélangées) comme priorité absolue ?